Nombreux sont les auteurs qui s’intéressent à cette question du passage de la vie professionnelle, active, remplie, à celle d’une vie plus calme, mais non moins engagée et qui caractérise la retraite.
Bien entendu, celle-ci n’a plus grand-chose à voir avec la retraite d’il y a encore cinquante ans. Inutile de s’attarder sur cette question, le quatrième âge symbolisant le retour presque triomphant d’une période de la vie supposée être davantage apaisée, dégagée des enjeux de performance, de succès, de réussite parfois.
Il ne serait alors plus question de performer, mais bien d’être (enfin) davantage soi-même et dans un rapport de soi à soi plus authentique et moins stressé ?
Pas si simple !
Ainsi et comme pour toutes les grandes étapes d’une vie, le passage à la retraite s’inscrit dans un contexte de changement de vie, de style de vie et d’habitudes, et duquel découle une transition qui peut être définie comme un temps de passage […] nécessitant de l’individu la mise en œuvre de stratégies d’adaptation (Balleux et Perez-Roux, 2014, p. 102).
Alors que tout processus de transition est souvent vécu comme une rupture identitaire et professionnelle de fortes intensités (Fabre et al., 2011), Masdonati et Zittoun (2012), ajoutent à cela le défi d’avoir à quitter un lieu ou des situations déjà connus et une nécessité d’avoir à construire de nouvelles activités qui ont du sens pour soi, afin de s’adapter aux nouvelles conditions de son environnement. Il est donc bien question de s’adapter, de s’ajuster, mais aussi de s’habituer, de s’accorder et finalement de s’approprier une nouvelle réalité face à des enjeux de vie qui évoluent. Fabre, Gatignon et Ventolini (2012) précisent qu’une transition « est toujours un moment délicat à vivre, chargé d’imprévu et de stress » (p.1).
À cet effet, l’étude canadienne réalisée par Lachance, Vaillancourt et Richer (2004), s’est intéressée au stress rapporté par 63 individus vivant en couple et lors de leur passage à la retraite. Les auteurs constatent qu’une bonne adaptation pourrait s’expliquer par ce qu’ils nomment une lune de miel , précisant que selon Atchley (1976), les individus, au moment de la retraite, se retrouvent dans cette phase euphorique au cours de laquelle ils tentent d’accomplir ce qu’ils n’ont jamais eu le temps de faire (p.3).
Par ailleurs, les auteurs ajoutent que cette phase peut être suivie d’une période de désenchantement où l’individu réalise que la retraite ne correspond pas à ses attentes (Atchley, 1976, cité par Lachance, Vaillancourt et al., 2004).
Selon Atchley (1976 ; cité par Tajjedine, 2014), le risque de détresse psychologique augmente lorsque la transition vers la retraite entraîne une discontinuité dans les ressources internes et les ressources externes dont disposent les individus avant et après la retraite. En effet, la retraite s’accompagne souvent de baisse de revenus et de changement de modes de vie qui peuvent avoir des conséquences sur le bien-être et la santé psychologique des aînés.
À l’inverse, des personnes ayant occupé toute leur vie un emploi physiquement difficile ou ayant évolué dans un environnement de travail stressant peuvent voir leur équilibre psychologique s’améliorer au moment du passage à la retraite (Wheaton, 1990).
Selon Tajjedine (2014), ce sont cinq catégories de facteurs qui caractérisent le contexte de vie après la retraite et qui peuvent avoir une influence sur l’équilibre psychologique des retraités. Ainsi : ce sont les ressources financières, l’état du réseau social et du soutien social, le niveau de stress, la santé, et le mode de vie.
Il semble finalement que le stress quotidien chronique soit un important facteur de risque de détresse psychologique chez les aînés, tout comme le fait d’être en situation d’invalidité ou de maladies chroniques (Tajjedine , 2014)
Frédéric Piot, orienteur au Québec